La saison 2016 du Mémorial de Coudehard-Montormel mise sur plusieurs événements inédits, des paris aussi : l’art contemporain et une nouvelle visite sur le champ de bataille, l’un des moments forts de l’été.
Un lieu unique chargé d’émotions
“Le Mémorial de Montormel est certes un lieu d’histoire mais c’est aussi un lieu très fort, unique, où l’on vient chercher de la culture, des émotions” a résumé en préambule de la présentation de la nouvelle saison, la vice-présidente du Conseil départemental de l’Orne, Christine Roimier.
Des propos repris par la présidente de l’association du Mémorial, Edith Bozot qui a tenu à saluer au passage le partenariat avec l’Office départemental de la culture et sa directrice Claire Aubrat “et l’engagement de Stéphane et son implication très forte dans les visites guidées”.
Stéphane, pour Stéphane Jonot, la directeur du Mémorial, qui est en effet une cheville ouvrière du site incontournable. Depuis des années en effet il met toute sa passion au service de la découverte de ce lieu puissant, malheureusement encore trop méconnu des millions de touristes qui convergent vers la côte normande, mais qui est pourtant un élément clé du dénouement de la Seconde Guerre mondiale et le théâtre de la fin de la Bataille de Normandie.
Tout le programme 2016
■ Lecture
Le Théâtre de la Boderie, compagnie ornaise, a choisi d’offrir une lecture de poèmes et de textes de Charlotte Delbo. Les lectures de Marie Guyonnet seront entrecoupées de chants interprétés par Stéphanie Weill, dans un décor de Marie-France Dubromel.
Charlotte Delbo, née le 10 août 1913 à Vigneux-sur-Seine et morte le 1er mars 1985 à Paris, est une femme de lettres française et une résistante qui a vécu la déportation. Communiste, issue d’une famille d’immigrés italiens, elle travaille avant la guerre comme assistante du metteur en scène Louis Jouvet. Elle s’engage en 1941 dans la Résistance avec son mari qui sera arrêté avec elle et fusillé en 1942. Elle est déportée à Auschwitz avec le seul convoi de prisonnières politiques françaises.
Elles étaient 230 femmes, 49 d’entre elles ont survécu. Parmi elles Charlotte Delbo, qui écrit sur sa déportation, sur la puissance de la camaraderie qui lui a sauvé la vie et sur Georges, son mari fusillé au Mont-Valérien.
Ces textes sont des odes à la vie et à l’humanité.
Lectures d’après :
Charlotte Delbo, Auschwitz et après. Tome II : Une connaissance inutile, Ed. de Minuit, 1970.
Charlotte Delbo, Qui rapportera ces paroles et autres écrits inédits. Ed. Fayard, 2001.
Charlotte Delbo, Et toi, comment as-tu fait ? Ed. Fayard, 1971
► Vendredi 13 mai : Charlotte Delbo, poèmes et autres textes – Théâtre de la Boderie à 20h30 en l’église de Coudehard. Tarif : 5 €. Rens./Rés. : Mémorial de Montormel 02 33 67 38 61.
■ Musique
Hélène Collerette : violon, super-soliste de l’Orchestre Philarmonique de Radio France. Cécile Agator : violon, premier chef d’attaque des seconds violons de l’Orchestre Philharmonique de Radio France. Vincent Dormieu : Alto, alto solo des Solistes Français, soliste de l’Orchestre Région Centre Tours, intervenant au sein de l’Orchestre Philharmonique de Radio France et l’Orchestre Nationale de France. Avec l’aimable participation de Sébastien Van Kuij, violoncelle.
Au programme : La Paix
Haydn : « Lever de soleil », Quatuor opus 76
Beethoven : Quatuor opus 59, n°2
L’ensemble Philéas est né de la volonté commune de musiciens épris de musique de chambre sous toutes ses formes et animés par l’envie de contribuer à son rayonnement sous l’impulsion de Vincent Dormieu.
Des solistes talentueux composent cet ensemble à géométrie libre. Ils se réunissent pour jouer aussi bien en sonate qu’en trio, quatuor, quintette ou sextuor et sont issus des plus grands orchestres parisiens : Orchestre national de France, Orchestre philharmonique de Radio, France, Strasbourg… Chaque concert commence par une présentation des compositeurs et du contexte dans lequel ils ont créé leur oeuvre. En résonance avec l’intimité qui sied à la musique de chambre, l’Ensemble Philéas entretient une grande proximité avec le public.
► Vendredi 17 juin 2016, à 20h30 en l’église de Coudehard. Tarif : 5 €. Rens./Rés. : Mémorial de Montormel 02 33 67 38 61
■ Spectacle
Hommage à son père, à Jean Jaurès, à tous les Jean partis au combat bercés par la hardiesse et la foi, ce solo de Patrice de Benedetti – chorégraphié en relation avec Yui Mitsuhashi - aborde avec force, tendresse et aménité les notions du don, de l’espoir, du rapport à soi et au monde.
Le monument au mort, lieu ordinaire, ne devient « haut lieu » quʼune ou deux fois dans lʼannée. Ne pourrait-il être pas être autre chose quʼun lieu grave, chargé d’histoire ? Nʼaccueillant que cérémonies et commémorations militaires ?
Ce nʼest pas un cimetière dans la ville, imposant recueillement et silence. Cʼest un lieu de témoignage ; où la prise de parole devrait être possible, même par le corps. Une simple tribune de pierre où une histoire pourrait être racontée.
Avec Jean, Patrice de Bénédetti mêle à son écriture chorégraphique le butô (”danse du corps obscur”), cette danse d’état et de non émotions, née en lendemain de la Seconde guerre mondiale.
Spectacle suivi d’une rencontre avec l’artiste.
►Mardi 30 août 2016. JEAN, solo pour un monument aux morts par Patrice de Bénédetti. A 19h (à partir de 6 ans) au Mémorial de Montormel (en extérieur, repli à l’église de Coudehard en cas d’intempéries). Tarif : 5 €. Rens./Rés. : Mémorial de Montormel 02 33 67 38 61.
■ Exposition
Titulaire d’un Diplôme Supérieur d’Arts Appliqués mention « mode et environnement » de l’Ecole Duperré, Anne Laval développe une fascination particulière pour les matières fragiles. Après une approche « classique » de la sculpture, à laquelle elle se forme dans un atelier à Montreuil en 2005, elle commence à modeler le métal en 2008. Obsédée par la finesse, tant du matériau que du façonnage, elle travaille également la corde tressée et la cellulose. En 2010, son oeuvre devient encore plus évanescente et des nuages vaporeux de laine d’acier et de cordes à piano prennent vie sous ses doigts. Afin de travailler des matériaux aussi ténus que la poussière ou les cheveux, la plasticienne s’initie également à la gravure, et à l’alugraphie en 2011.
Quelques mots de l’artiste
Des mots recueillis par les organisateurs de cette nouvelle saison :
“Dans ce mémorial de Montormel, plusieurs choses m’ont touchée, le contraste de la beauté du paysage et de l’horreur de ce qui s’est passé : les civils non évacués, cachés dans des endroits étriqués, le couloir de la mort qui est resté dans les traces de la bataille durant un long moment, les civils qui ont dû vivre pendant et après avec les chars et les cadavres.
Il était pour moi, qui travaille en suspension, obligatoire pour ces oeuvres de venir à la terre. Des socles de plexiglass, écrin muséographique sont placés au sol. Ils contiennent des « fossiles paysagés » tel une fouille archéologique du sensible. On s’accroupit pour regarder, on prend le temps, on se recueille. J’ai éprouvé l’envie de créer des vestiges de la mémoire de ce lieu. Entre maquette, paysage vallonné et corps cachés, des formes, coquilles, prennent vie avec de la porcelaine mélangées aux fibres de métal (métal resté longtemps dans ce couloir).
“La terre est découpée, sectionnée…”
La terre est découpée, sectionnée comme des parcelles terrestres, puis mise au feu (cuisson) et enfin assemblée, cousue, suturée, réparée. Premiers fossiles.
La porcelaine se mélange ensuite aux billes de verre, pour percer la terre : pluie, balles, impacts. Deuxième paysage fossilisé.
Puis vient la cellulose, le minéral laisse la place au végétal. Comme la clématite sauvage sur l’arbre mort, la fibre d’acier vient se déposer, habiller, protéger, camoufler le paysage. Elle s’envole comme une graine pour planter le souvenir. Troisième paysage fossilisé.
Enfin les végétaux trempés dans la porcelaine viennent disparaître sous l’effet du feu et forment des ossements de plantes. Le végétal se lie intimement avec l’homme et sa disparition.
Toutes ces interprétations de ces paysages fossilisés mêlent questionnements et réflexions autour de la trace de l’histoire de Montormel qui devient la grande Histoire.”
► Du samedi 2 juillet au dimanche 4 septembre. Au Mémorial de Montormel. Visite libre / Renseignements : Mémorial de Montormel 02 33 67 38 61.
■ Visites commentées sur le champ de bataille
Quatre temps forts de la saison, sous la houlette de Stéphane Jonot qui embarque une cinquantaine de visiteurs (pas plus, pour des raisons de confort et de sécurité) durant plusieurs heures sur le champ de bataille. Une expérience unique. Rendez-vous à 14h30 au Mémorial, gratuit sur réservation au 02 33 67 38 61.
► Les civils : samedi 4 juin
Le 22 août 1944, la bataille de la poche Falaise – Chambois s’achève avec la libération de Tournai-sur-Dive. Pendant plusieurs jours, cette paisible localité de la vallée de la Dives était devenue le coeur de la nasse vers lequel toutes les unités allemandes en repli convergeaient pour se regrouper afin de franchir les rares points de passage encore disponibles sur la Dives.
Cette concentration de troupes n’avait pas échappé à la vigilance des alliés qui concentraient leurs tirs d’artillerie sur la commune. Les habitants mais aussi un grand nombre de réfugiés se retrouvèrent alors sous un déluge de feu .L’action courageuse de l’abbé Launais, curé de la paroisse, permit de mettre fin à leur calvaire en allant à la rencontre des alliés, il pu négocier la reddition des Allemands et la fin des combats
► Les Polonais – samedi 9 juillet
Le 19 août 1944, deux colonnes de la 1ère division blindée polonaise prennent position respectivement sur la cote 262 nord et Chambois, coupant les axes de repli de l’armée allemande en déroute. Par cette action, au débouché du Couloir de la Mort elles viennent fermer la poche de Falaise Chambois. Les troupes polonaises du général Maczek vont, jusqu’au 21 août, subirent les contre-attaques des allemands encerclés. Les Polonais débordés de part et d’autre, coupés de leurs arrières, sans ravitaillement, vont réaliser l’un des plus beau fait de la Bataille de Normandie.
Ce sont ces lieux que le Mémorial vous propose de découvrir dans le cadre d’une visite guidée nous emmenant de 262 Nord à Chambois.
► Les Américains – samedi 6 août
Le 13 août 1944, les troupes américaines atteignent sans combat le Bourg St Léonard évacué des troupes allemandes qui l’occupaient. Mais bientôt les allemands vont contre-attaquer. Le contrôle du village est en effet essentiel pour assurer les replis de forces allemandes encerclées dans la poche de Falaise Chambois.
Jusqu’au 18 août, celui-ci va être l’enjeu de sanglants combats d’infanterie et de chars et changer à plusieurs reprises de main. Le 18 août, les américains l’ayant enfin dégagé vont reprendre leur route sur Chambois afin de réaliser leur jonction avec les polonais et assurer la fermeture du la poche de Falaise Chambois.
Ce sont ces lieux que le Mémorial vous propose de découvrir dans le cadre d’une visite guidée nous emmenant du Bourg Saint-Léonard à Chambois.
► Les Canadiens – samedi 10 septembre
Le 18 août 1944, il est environ 13h quand les premiers éléments canadiens pénètrent dans Trun en flammes. Le 19 août 1944 en début de matinée, un détachement du South Alberta Regiment commandé par le major Currie investit St Lambert sur Dives.
Les derniers ponts disponibles pour la retraite allemande tombent alors aux mains des alliés. En sous-effectifs, les Canadiens vont néanmoins infliger de lourdes pertes aux Allemands et gêner considérablement leur repli. Le 21 août à midi, deux bataillons de la 4è division blindée canadienne effectuent la jonction avec les Polonais du général Maczek sur la commune de Coudehard. La poche de Falaise Chambois est définitivement fermée.
Par ces actions, les Canadiens furent amenés à jouer un rôle majeur dans les combats de la poche de Falaise-Chambois. Le Mémorial va vous entraîner sur le pas dans ces évènements décisifs de la campagne de Normandie.
■ Pratique
Le Mémorial de Montormel est ouvert du 1er mai au 31 août tous les jours de 9h30 à 18h. A noter que des visites virtuelles du champ de bataille sont également possible en suivant “Les trois jours d’Agata”. Une visite géo-localisée interactive à faire seul ou en famille
