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Crise agricole. « Ceux qui s’en sortent vivent comme des miséreux »

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Après quinze années passées dans l'exploitation familiale, Manuella Belliard a vendu sa ferme le 29 juin 2015, tant le poids des dettes était intenable. Depuis le 20 août, elle occupe un poste de monitrice à la Maison familiale et Rurale d'Alençon où, dans son bureau, elle affiche des vaches. -
Après quinze années passées dans l'exploitation familiale, Manuella Belliard a vendu sa ferme le 29 juin 2015, tant le poids des dettes était intenable. Depuis le 20 août, elle occupe un poste de monitrice à la Maison familiale et Rurale d'Alençon où, dans son bureau, elle affiche des vaches. -

« L’agriculture, c’est un beau métier, plein de bonheurs. Comme celui de voir le soleil qui se lève au printemps pendant que les vaches font leurs fofolles en entrant dans le champ… Mais il n’y a aucun retour ! »

Six mois après avoir vendu l’exploitation de Fontaine-les-Bassets qui a vu grandir son père et sa fratrie, Manuella Belliard n’affiche aucun regret. « Je n’ai pas quitté l’agriculture parce que je n’aimais pas cela. Au contraire, j’ai toujours aimé les animaux. Mais parce que ça ne fait pas vivre ma famille. En tant que mère responsable de trois enfants, il a fallu faire un choix ! »

« La cata totale »

Si elle assume, sans complexe, la vente de son exploitation, l’Ornaise de 39 ans, avoue cependant que la décision n’a pas été aussi aisée qu’elle l’annonce. « C’est même ce qui a été le plus difficile », avoue-t-elle. Mais la nouvelle crise agricole qui éclate la rassérène. « Quand j’y croyais encore, au moment du plan de redressement, on s’est dit qu’il ne nous fallait plus de mauvaises années. Mais là, avec le prix du lait plus bas que celui de la crise laitière de 2009, ça aurait été la cata totale ! Moralement, ça aurait été très compliqué de se dire qu’on n’avait pas fait le bon choix ».

S’estimant « chanceuse » de l’issue de son plan de redressement, elle veut aujourd’hui faire entendre « qu’avoir des difficultés financières et ne pas arriver à y faire face, ce n’est pas la fin du monde ! » La solution ? « En parler et si possible, très tôt, pour éviter d’aller au bout du bout. » Ce qu’elle a fait, elle, après quinze années d’installation.

« C’est un échec professionnel pour moi, il ne faut pas se le cacher. Mais c’est difficile aussi d’avoir tous les jours les pieds dans la merde et de ne pas réussir à s’en sortir, de donner tout pour le boulot et de ne pas réussir à en vivre. Les agriculteurs sont des gens honnêtes qui ne méritent pas cela ».

« Une leçon de vie »

Certes, elle reconnaît que « certains s’en sortent et font de l’argent, notamment ceux qui ont de beaux outils et qui laissent le capital dans la ferme mais pour ceux dont ce n’est pas le cas, c’est plus compliqué. Ou alors, ils s’en sortent parce qu’ils vivent comme des miséreux. Ils laissent tout dans la ferme et vont au Secours Populaire et aux Restos du Cœur ».

Pour autant, Manuella Belliard ne regrette rien. « Je me suis éclatée pendant quinze ans dans mon métier. Celui que j’avais choisi. Le seul que je connaissais ». De son « échec professionnel », elle fait « une leçon de vie pour mieux rebondir ».

Son portrait à lire dans l’Orne-Hebdo de mardi 2 février 2016.

Depuis le 20 août, Manuella Belliard est monitrice à la Maison Familiale et Rurale d'Alençon où elle est en charge des CAP horticole.
Depuis le 20 août, Manuella Belliard est monitrice à la Maison Familiale et Rurale d'Alençon où elle est en charge des CAP horticole.

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