Trois hommes regroupés en bout de table, non pas près du radiateur mais à proximité de la cuisine.
Et neuf femmes.
Soit douze élèves constituant une bonne tablée à deux pas d’un tableau plus vert que noir, mais sans blouse, sans encre violette, sans plumier, sans buvard, sans protège-cahiers, On peut zieuter sur le cahier d’à-côté ou d’en face mais personne ne s’y risque.
L’heure des « t »
Après avoir fait l’appel, Suzanne Salé, professeur des écoles hier en poste dans le nord-Sarthe, aujourd’hui retraitée, lit le texte du mois, rédigé par la romancière Amélie Nothomb. Une dictée créée en décembre dernier pour l’association ELA qui lutte contre les leucodystrophies.
La romancière belge a élaboré un texte facile que Suzanne Salé a donc choisi pour cette dictée de rentrée. Le vocabulaire est simple : pas de mots compliqués provoquant de maux de tête, même pas « une fois », encore moins septante ou nonante fois.
Mais plusieurs élèves butent sur le mot « basket » et doublent la lettre finale. Est-ce l’effet de l’hiver doux ? C’est l’heure des « t ». Mais, c’est une chose sûre : il n’y en a qu’un. « Pourtant, dans l’Orne Hebdo, vous l’écrivez avec deux t… ». Un commentaire reproduit librement, pas sous la dictée. A deux pas de l’usine qui produit du camembert, on ne va pas en faire un fromage.
Un dico à Noël
La diction est impeccable, l’articulation méticuleuse : « à la ligne, et vous sautez une ligne, virgule, deux points… ».
C’est fini : Marythé, un poil dissipée, est venue avec des chocolats et des berlingots de Carpentras. « Tu restes combien de temps ? » lui glisse (avec humour) sa voisine.
On échange les cahiers pour la correction.
Micheline Houalet, 78 ans, s’est arrêtée au BEPC mais n’a commis qu’une demi-faute. Elle apprécie l’exercice : « j’aime ça ». Il y a quelques jours, le père Noël lui a apporté un nouveau dictionnaire qui remplace celui qui avait plus de vingt ans d’âge. Dans sa famille, « ils savaient que ce cadeau me ferait plaisir ».
En finale nationale
Au sein de « Générations mouvement », nouvelle appellation des clubs d’Aînés ruraux, cette femme de Damigny a été sélectionnée pour la finale nationale qui se déroulera en juin, le mois de la distribution des prix. Et comme l’exercice se déroulera à Deauville, elle effectuera le déplacement.
D’ici là, Micheline et ses camarades de classe participeront à la prochaine dictée, le mercredi 3 février. Même heure, même lieu (1). Un rendez-vous honoré sans faute.
Suzanne Salé annonce la couleur : « ce sera une dictée lipogrammatique ». Après Amélie Nothomb, Georges Pérec ?
JMF
(1) 10 heures, salle du Houx à Pacé.
La dictée est ouverte aux Aînés du canton de Damigny et c’est le club de Pacé (présidé depuis trois ans par Jean-Pierre Lizot) qui l’organise chaque mois. La lectrice, Suzanne Salé, a succédé à ce poste à Marinette Wolf.