« Pourquoi pas toi ?, m’a dit ma patronne ». Employée depuis sept ans, Gaëlle Lorcy a réfléchi et « l’idée a fait son chemin. Des clients m’encourageaient en ce sens ».
Depuis janvier 2017, elle est aux commandes d’une institution dans le monde des Routiers : l’escale du Ménil-Broût, une maison ornaise de 61 printemps.
Deux échangeurs
C’était en 1956. Les parents de Ghislaine Gautier créaient l’enseigne « À la bonne franquette ». La Nationale 12 passait devant la porte. Une affaire longtemps tenue par Ghislaine, la fille, 73 ans aujourd’hui, qui vient donc de céder le volant.
La Nationale 12 est déviée depuis 2010, le trafic n’est plus le même. Pourtant, des camions, il en passe encore beaucoup. Ceux qui fréquentent le Centre d’Enfouissement Technique des Ventes-de-Bourse. Mais aussi ceux qui sortent de la N12. Car le Routier est à trois tours de roue d’un double échangeur, et celui d’Hauterive est à peine plus loin. Une chance.
David, co-pilote
Certes, il est bien fini le temps de l’ouverture 24 heures sur 24. Certes, les pompes à carburant appartiennent au passé. Mais la maison tient debout et Gaëlle Lorcy ne regrette rien de ce virage professionnel.
Ce qu’elle apprécie : « les relations humaines ». Même si la charge de travail est énorme : « ce n’est pas trop d’être deux ».
Son mari David, co-pilote, apprécie également ce changement de vie, lui qui travaillait dans le monde de la boucherie, dans la grande distribution notamment : à Mamers, Rémalard, Condé-sur-Sarthe, La Ferté-Macé. « J’en faisais des kilomètres… ».
Ses journées commençaient à 4 h 30, celles de Gaëlle s’achevaient à 23 h 30. « On vivait en décalé. On avait envie d’avoir une affaire et d’être ensemble ».
À la bonne franquette
Voilà qui est fait. Il est aux fourneaux, elle s’occupe du reste, notamment le bar, rejointe en soirée par une employée.
La clientèle du midi ? « Des locaux, des ouvriers de chantier, etc. ». Le soir ? « 90 % de routiers ».
« La meilleure pub, c’est le bouche-à-oreille », confie un ancien chauffeur qui a roulé à travers toute l’Europe et qui apprécie « l’accueil et le bien manger ». La bonne franquette figure donc toujours au menu.
Six jours sur sept
Les semaines de travail défilent comme les véhicules sur l’autoroute des vacances : elles commencent le lundi à 6 h 30, puis à 4 h 30 car les routiers, qui dorment dans leur camion stationné sur le vaste parking à l’écart des nuisances sonores, démarrent dès 5 heures, quand Le Ménil-Broût s’éveille. Là, ils trouvent petit déjeuner et coin pour prendre une douche puis le volant.
La semaine s’achève vers 9 h 30 le samedi. Enfin… presque : « il faut faire des courses, de la paperasse, etc. Tout le samedi, on y est encore ». Reste le dimanche pour récupérer d’une « bonne fatigue » qui s’atténue d’autant plus aisément que « les efforts sont récompensés ».
Décor rajeuni
Le couple démarre donc pied au plancher mais « rien n’est acquis, il faut garder les pieds sur terre, se remettre en question ». Des projets sont dans les cartons, à commencer par un coup de fraîcheur dans l’immeuble. Jusqu’alors le fond passait avant le décor.
Et bientôt « Chez Ghislaine » deviendra « le relais du Ménil-Broût ».
Toujours coté dans le monde des Routiers. Depuis 1956 donc, lorsque la maman de Gaëlle fut la première serveuse des fondateurs : « je pense à eux ».
JMF