Le 13 janvier dernier, alors qu’il déchargeait ses courses devant son domicile, à Alençon, un nonagénaire s’est fait subtiliser sa voiture : avec vélocité, le voleur a fermé le coffre et s’est installé à la place du conducteur.
Quatre jours plus tard, un voisin de la victime lui indique qu’il a repéré la voiture volée. La Clio est stationnée dans une rue avoisinante. Accompagnés d’une troisième riveraine, les deux hommes se rendent sur place et tombent nez à nez avec le voleur. Il refuse de rendre la Renault, qu’il considère comme sienne, et dégaine une bombe lacrymogène avec laquelle il asperge les trois riverains.
Ces derniers (qui ont chacun écopé de deux jours d’ITT : Incapacité totale de travail) portent plainte au commissariat d’Alençon, et livrent une description précise du mis en cause.
Le quinquagénaire est interpellé chez lui, le 18 janvier. En garde à vue, il outrage une fonctionnaire de police (en lançant des insultes racistes : « Sale nègre, sale singe »), et nie les faits.
Une position qui a évolué : jugé le 16 février devant le tribunal correctionnel, l’Alençonnais a admis être le voleur violent.
« État psychiatrique fragile »
« J’ai vu le vieux monsieur qui déchargeait ses packs d’eau, y’avait qu’à fermer le coffre pour récupérer la voiture », indique-t-il. Pourquoi soustraire la Clio (la voiture a été retrouvée quai Henri-Dunant) ? « J’en avais besoin pour prendre l’air, je suis allé au Mans », répond celui qui n’est pas titulaire du permis de conduire. « Je m’excuse. Je n’ai pas touché aux affaires dans le coffre », ajoute-t-il, n’hésitant pas à couper la parole au tribunal.
Le prévenu, dont l’état psychiatrique est « extrêmement fragile », n’avait « pas pris son traitement », le jour du vol et lors de l’outrage en garde à vue. Quid de l’agression à la bombe lacrymogène ? « Ce n’était pas une agression. J’ai donné un coup de bombe pour les éloigner de la voiture : je voulais partir rapidement sans blesser personne. Je m’étais déjà pris un coup de baguette de pain sur la tête ! ».
Un « discours inquiétant », constate la substitut du procureur - « Le prévenu sort donc une arme pour mettre à l’abri, protéger », et un comportement souvent agressif – « Dès qu’il est mis face à ses contradictions, le prévenu est impulsif ». Audrey Berrier note par ailleurs que le quinquagénaire (en état de récidive légale pour les violences et l’outrage) « minimise sa responsabilité », et requiert à son encontre un an de prison ferme (assorti du mandat de dépôt), ainsi que l’interdiction de détenir une arme pendant deux ans.
« Il est très maladroit dans sa façon de s’exprimer mais reconnaît les faits », tempère la défense, qui demande aux juges d’écarter le mandat de dépôt.
Un argument qui n’a su convaincre : le tribunal a suivi les réquisitions du parquet. Le prévenu a été incarcéré à l’issue de l’audience et devra indemniser les quatre victimes.