Quatre prévenus comparaissaient devant le tribunal correctionnel d’Alençon, jeudi 2 février. Trois jeunes (21, 23 et 24 ans) et une femme de 53 ans impliqués à des degrés différents dans un trafic de cannabis basé dans le Perche (Tourouvre-au-Perche et Autheuil) et qui rayonnait sur tout le département de l’Orne.
Plus de 16 000 € de bénéfices
La prévention court (pour le principal prévenu) d’octobre 2011 au 28 octobre 2015, date à laquelle les gendarmes de la brigade territoriale de Mortagne-au-Perche surprennent trois jeunes en flagrant délit d’usage de cannabis, dans un jardin public.
L’un d’eux remet spontanément quatre sachets contenant plus de 17 gr de résine. Un autre avoue cultiver et revendre.
L’interpellation donne lieu, dès le lendemain, à une perquisition. À Autheuil, les gendarmes trouvent 500 gr d’herbe, 190 gr de résine, plus de 400 € en petites coupures, cinq sachets de graines, une balance, sept pieds de cannabis mais aussi des armes (pistolets automatiques).
Le locataire des lieux admet « revendre depuis quatre ans ». À la barre, l’Ornais âgé de 23 ans confirme : « Je fumais beaucoup, 15 joints par jour. Le trafic me permettait de financer ma consommation qui se faisait de plus en plus grande », explique-t-il. Le prévenu indique avoir acquis 4,8 kg de résine à Dreux et Évreux sur une période de quatre ans. Il revendait en moyenne 50 gr par mois, à une quinzaine de clients.
Un business interlope qui lui a rapporté 16 800 €. « Je ne suis pas un dealer, juste un adolescent rebelle. C’était une bêtise », se défend-il.
Pourtant, de l’Eure à l’Orne, le circuit était « bien établi », observe le président Emmanuel Chauty. Et le jeune s’était armé pour se « protéger » et « protéger la famille » : « L’activité du trafic était telle qu’elle constituait un risque », poursuit le président.
Mère infirmière et complice
Pendant sa garde à vue, l’Ornais (placé depuis sous contrôle judiciaire) a livré des noms. Dont celui de son « concurrent », également présent dans le prétoire.
Domicilié à Tourouvre-au-Perche, ce dernier admet s’être livré au trafic de cannabis d’avril 2013 à décembre 2015. En tout, il a acheté 3 kg de résine en deux ans et demi (pour une dizaine de clients) mais également fait pousser de l’herbe avec l’assentiment de sa mère, prévenue de complicité de détention de stupéfiants.
Leur domicile a été perquisitionné. Les gendarmes y ont trouvé une chambre de culture, des graines, de la résine… « Je fumais jusqu’à 20 joints par jour. Lorsque j’ai voulu cultiver de l’herbe pour ma consommation personnelle, j’ai demandé l’autorisation à ma mère », indique le prévenu au tribunal. La maman, infirmière, a accepté : « Je savais que c’était un fumeur avéré. Je préférais que l’herbe soit à la maison plutôt qu’elle vienne d’ailleurs », justifie celle qui donnait parfois un coup de main pour l’entretien des plants. Un « discours permissif » qui « surprend » le tribunal : « En tant que professionnelle de santé vous êtes sensibilisée aux dangers du cannabis et vous auriez pu accompagner votre fils vers des soins ».
Le jeune homme de 21 ans avait aussi un « associé » : le quatrième prévenu du procès. « On a investi ensemble dans un premier box ». Lui aussi était consommateur quotidien de cannabis, et 360 gr d’herbe ont été retrouvés chez lui. Une culture pour sa « consommation personnelle » : « Je ne vendais que de la résine » (environ 3 kg en tout).
Devenu jardinier !
Depuis, tous sont devenus abstinents, et le principal prévenu a mis à profit ses talents horticoles : « J’ai décroché un mi-temps de jardinier », informe-t-il.
À l’encontre de ce dernier, le parquet a requis une peine de 24 mois de prison dont 12 mois assortis d’un sursis avec mise à l’épreuve et 750 € d’amende. Pour les deux trafiquants associés, le procureur de la République a requis 18 mois de prison dont un an assorti d’un sursis avec mise à l’épreuve. Il demande par ailleurs 800 € d’amende pour la mère complice.
Après en avoir délibéré, le tribunal a condamné le principal prévenu à la peine de 24 mois de prison dont 12 mois assortis d’un sursis TIG (travail d’intérêt général) de 72 heures à effectuer dans un délai de 18 mois. Il devra également se soumettre à des examens médicaux et ne pourra détenir une arme pendant 10 ans.
Son « concurrent » a écopé de 18 mois de prison assortis d’un sursis avec mise à l’épreuve de 12 mois (pendant 2 ans) comprenant les obligations de se soumettre à des examens médicaux, de travailler, et l’interdiction d’entrer en contact avec son ex-associé. Il devra par ailleurs s’acquitter d’une amende de 300 €. Sa mère a été condamnée à un mois de prison avec sursis. Quant à l’ex-associé, il a été condamné à 18 mois de prison dont 12 mois assortis d’un sursis avec mise à l’épreuve (pendant deux ans) comprenant les mêmes obligations, ainsi qu’à une amende de 500 €.