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Santé : « J’ai vu la souffrance à l’hôpital : pas celle des malades, celle du personnel »

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« Aujourd’hui, pour des questions d’économie, le temps passé avec chaque patient est restreint », regrette le patient alençonnais (photo d’illustration)

Il se défend d’emblée d’appartenir « à la gauche syndicaliste ». Il s’affiche plutôt comme « libéral ». Mais le service public, il y tient. Alors, quand il a lu la « lettre ouverte à l’hôpital » rédigée par une habitante de Saint-Germain-du-Corbéis et publiée dans l’Orne Hebdo du 1er novembre, il a souhaité réagir.

L’Alençonnais (qui veut conserver l’anonymat), a lui aussi récemment séjourné au centre hospitalier d’Alençon (en septembre et octobre 2016). Lui aussi, n’a pas eu la chambre individuelle qu’il avait demandée. « La proximité avec l’autre patient était franchement gênante ». Mais c’est surtout pour dénoncer « une grande souffrance » du personnel soignant, que l’avocat stagiaire témoigne.

« Proche du burn-out »

Sa première hospitalisation (fin septembre) a duré une semaine – «  J’avais une péritonite ». La seconde (15 jours plus tard) s’est prolongée pendant quasiment trois semaines : « J’ai fait une infection. J’avais deux abcès et j’ai dû être réopéré ». Le trentenaire a passé une soirée dans le couloir des urgences : « Il n’y a pas de place ailleurs, alors les lits s’agglutinent. C’est indécent ». Parce qu’il a ensuite fait l’objet d’un protocole sanitaire particulier, l’Alençonnais a bénéficié cette fois-ci d’une chambre individuelle.

Pour calmer la douleur – « J’avais 38 agrafes sur le corps » - il était équipé d’une pompe à morphine. Un traitement antalgique administré par l’infirmière. « Un soir où je souffrais atrocement – j’étais à 7 sur 10 sur l’échelle numérique - j’ai appelé l’aide soignante. Elle m’a regardé avec un air désespéré, m’assurant que l’infirmière viendrait dès que possible ». Mais le patient a attendu… deux heures, avant de recevoir ses antidouleur. Une soirée « abominable ».

Il n’a toutefois pas passé ses nerfs sur le personnel : « J’ai bien vu que l’aide soignante et l’infirmière étaient complètement dépassées par la situation : elles n’étaient que deux dans le service ». Un rapport d’incident a été dressé.

Pendant cette période, un nouveau système informatique était en cours d’installation. « Les équipes de jour étaient surstaffées. Pas celles de nuit », rapporte le patient. « Je n’en veux pas au personnel soignant. J’ai vu la souffrance : l’infirmière avait les yeux rouges. Elle était proche du burn-out », assure celui qui a demandé à voir le chef de service.

« Je lui ai demandé qui déterminait les priorités ici… Je lui ai signifié que c’était la panique, et que c’était à lui de faire remonter le mal-être ambiant ».

« Incapacité à faire face »

Pour « signaler la détresse », « pointer le malaise et les sous-effectifs », « dénoncer l’incapacité à faire face », l’Alençonnais a rédigé une missive adressée (le 26 octobre) au directeur de l’hôpital (Yves Geffroy) et au président du conseil de surveillance (Joaquim Pueyo). « Je ne réclame pas d’indemnisation ». Mais, à l’heure où l’on supprime des lits, des postes, le patient a jugé bon « alerter » pour « l’avenir du service public ».

Celui qui « défend l’hôpital de proximité » (il a préféré Alençon à Tours, où il exerce, afin d’être « proche de sa famille ») n’est désormais plus certain de remettre les pieds au centre hospitalier d’Alençon.

« Pourtant, les équipes y sont formidables, il y a de l’humanité dans les relations. Le personnel fait ce qu’il peut. Mais il faut lui laisser les moyens de s’occuper des malades. Aujourd’hui, pour des questions d’économie, le temps passé avec chaque patient est restreint. Pour ces gens qui aiment leur métier, sont dévoués, c’est une double peine : ils sont soumis à la pression de leur hiérarchie, et prennent en pleine face la colère des patients mécontents ».

« Renfort d’infirmière »
Le directeur chargé des relations avec les usagers, Jean-Claude Beucher, a répondu au trentenaire. Dans un courrier daté du 3 novembre, il explique que les services de chirurgie « ont été effectivement réorganisés début 2016 pour répondre à des objectifs d’adéquation aux capacités financières mais en gardant l’objectif de maintien de la qualité de prise en charge des patients ». Il ajoute : « Cette réorganisation a fait l’objet d’évaluation avec les personnels concernés et la charge en soins a démontré la nécessité d’un renfort d’infirmière ». Un renfort effectué peu après le passage de l’Alençonnais.
« Nous évaluons régulièrement les besoins dans chaque service. Si une réorganisation n’a pas été bien anticipée, nous corrigeons en ajustant systématiquement », nous confirme le directeur. Quid de la souffrance des personnels ? « Nous y sommes vigilants et faisons régulièrement des points avec les cadres ». Quant aux réclamations des usagers, elles sont « prises en compte » par une commission dédiée et « permettent de mettre en place des actions d’amélioration », conclut-il.


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