« Si le prévenu avait écrit « M. et Mme X entretiennent une relation extra-conjugale », il n’y aurait pas eu d’infraction ! », rappelle le vice-procureur de la République. Sauf que ce n’est pas ce à quoi s’est employé l’Ornais poursuivi, jeudi 30 juin, pour « faux et usage de faux » devant le tribunal correctionnel d’Alençon.
Expertise graphologique
En mars 2010, il avait expédié un courrier de deux pages de photos à la femme de l’amant de sa sœur avec cette mention : « Vous nous sommes mariés en cachette. Je suis sa maîtresse depuis plus de quinze ans ». Il avait signé du nom de sa sœur avec ses coordonnées. L’amant a fait expertiser la missive et le graphologue a confirmé que le frère était l’auteur de la lettre.
À la barre, le Percheron reconnaît avoir écrit ce courrier accompagné « d’une photo de [sa] sœur et de son amant prise lors du mariage de ma nièce en 2004 ». Mais il nie l’avoir expédié. « L’expert graphologue confirme que c’est bien votre écriture et le timbre de l’enveloppe n’a pu être acheté qu’après le 1er décembre 2009 donc c’est forcément vous ! », insiste la présidente.
Le prévenu justifie son acte par le fait que l’amant « sème la zizanie dans notre famille».
« Intention de nuire évidente »
Selon l’amant, la révélation des faits a eu « de graves conséquences » : « Ce sont 42 ans foutus en l’air. Ce n’était pas mon intention de faire du mal à la mère de mes enfants ».
Selon l’avocat parisien du couple illégitime, « l’intention de nuire est évidente ». Il réclame 30 000 € de dommages et intérêts pour l’amant ainsi que le remboursement de l’expertise graphologique et 15 000 € pour la sœur du prévenu. Il demande, en outre, 10 000 € de frais d’avocat, pour chacun de ses deux clients.
« Ma cliente s’est dite furieuse et anéantie à la lecture du courrier », annonce l’avocat parisien de la femme de l’amant. Il réclame, lui aussi, 30 000 € de dommages et intérêts pour sa cliente « car les faits sont gravissimes et les répercussions considérables ».
“Ce n’est pas le prévenu qui a ruiné le couple”
À l’heure de ses réquisitions dans cette « affaire peu courante », le procureur de la République rappelle que « ce n’est pas le prévenu qui a ruiné le couple visé, c’est bien la révélation de la relation ! C’est cette révélation qui met le couple en difficulté et le prévenu n’est pas à l’origine de la relation extra-conjugale ». Selon le Ministère Public, « c’est la manière de dénoncer cette liaison qui est critiquable et l’infraction est matériellement caractérisée ». Il requiert 1 000 € d’amende avec sursis.
Pour l’avocat alençonnais de la défense, « il n’y a eu aucune conséquence juridique à la suite de la révélation ». Il plaide la relaxe du prévenu.
Le tribunal a finalement condamné l’Ornais à 1 000 € d’amende avec sursis. Il devra dédommager l’amant à hauteur de 1 255 € pour l’analyse graphologique et à 1 000 € de préjudice moral. Sa sœur et la femme de l’amant se voient chacune indemniser à hauteur de 2000 € pour leur préjudice moral. Le prévenu devra également payer 1 500 € de frais d’avocat pour chacune des trois victimes.