Ah… ça, c’est sûr… si l’on veut conserver les jambes propres, il vaut mieux jouer au bilboquet bien au chaud. Mais pour avoir la tête moins maculée (pas au sens… propre mais au sens de polluée), il est sans doute préférable d’aller cavaler (enfin… presque) dans un champ aussi sale que spongieux que de rester scotché devant un écran de télévision, plateau-repas sous les yeux, tout en traitant les sportifs de fainéants et de dopés.
“Le cross, c’est l’école du courage et de la volonté”, lâche d’emblée Philippe Prioul, l’entraîneur de l’Intrépide de Pré-en-Pail. Et un bon crossman, c’est “une bonne préparation et un mental d’enfer”. Car des cross difficiles, il en existe encore, notamment au niveau régional où les compétitions sont en règle générale et paradoxalement plus dures qu’au championnat de France.
Un phénomène que constate également Franck Jouatel, crossman depuis plus de trois décennies : “il existe encore ici des cross “coton” avec une côte qu’il faut se taper”. Et si le championnat de France est moins difficile, c’est peut-être en raison de l’infrastructure, souvent un hippodrome, comme ce sera le cas le dimanche 6 mars au Mans, le titre suprême se jouant sur l’hippodrome des Hunaudières : “un circuit tout plat, et rapide, même mouillé”, observe Ph. Prioul.
Pour ce dernier, la raréfaction des cross “labours” est imputable à la logistique : “il faut un point d’eau, un parking, etc.”.
Et puis les “vedettes” nationales, on les bichonne peut-être. Du sport en sale, oui mais pas trop. À croire que, comme en maints domaines, on aseptise, on rabote, pas un poil ne doit dépasser, on formate, on doit entrer dans un standard, des clous, etc. C’est la France 2015.
Ceci dit, “parcours filant ne veut pas dire parcours facile pour autant : on est en permanence au taquet”, note F. Jouatel.
Quant à l’âge moyen, eh bien il augmente : “il reste encore quelques jeunes”, poursuit l’Alençonnais, mais la société a changé : “les jeunes d’aujourd’hui connaissent un autre confort et peuvent pratiquer des sports plus au chaud”.
Ce n’est pas toujours le cas sur la Plaine des sports d’Alençon-Perseigne balayée par le vent ou transie par le froid. Et à Pré-en-Pail, “qu’il pleuve ou qu’il neige, on s’entraîne. Ça fait partie de notre culture”, ajoute le Mayennais qui demeure au pied des Avaloirs, contrée à la météo parfois ingrate. Philippe Prioul glisse un bémol : “les jeunes aiment courir dans la boue. Souvent, ce sont plutôt les parents qui apprécient moins”… lorsqu’ils voient l’état des vêtements.
La saison débute. Franck Jouatel sera de nouveau au départ des cross : Saint-Mars-la-Brière le 8 novembre, Allonnes le 22 novembre, Montfort-le-Gesnois le 6 décembre, Spay le 20 décembre… Dans la Sarthe donc, il préparera les cross départementaux (Alençon, en janvier) et régionaux (Saint-Martin-de-Bréhal, fin janvier) en janvier et l’interrégional à Louviers, début février : “une bonne façon de préparer la saison sur route”.
JMF
Photo : Eddy Cloutier, dans un chaos de boue