Je suis un chêne, peut-être aux allures de gland. Ou un hêtre suprême. Ou un pin futaie ou non. En bordure de la route. Et j’écoute chaque année le son des corps au fond des bois.
Corps plus ou moins affûtés.
Des corps beaux ou moins beaux, des corps sages ou des corps marrants formant un cortège coloré.
Devant, y’a les reeboks et les oryx. Qui va déboucher en premier ? Les meilleurs sont noirs. Condamnés aux jarrets de rigueur pour gagner des miles sans gagner des mille.
Sport de malade(s)
Derrière, ça suit, de plus ou moins près. Comme des moutons.
Ah, celui-là, ce n’est pas possible : au kilomètre zéro moins quelques mètres, il se plaignait d’avoir mal ici, là, un peu plus loin, et même de l’autre côté du corps. En ce pays des jérémiades et de gémissements, et en cette journée internationale du bonheur, il a néanmoins pris le départ. La course à pied, ça doit donc être un sport de malade(s).
À moins qu’il soit dopé. Ça se fait dans le vélo et en athlétisme. Dans plein d’autres sports aussi, mais il ne faut pas toucher au foot et au tennis.
La destinée du fleuve
À moins qu’il y ait un petit moteur dissimulé dans ses chaussures, à l’instar de celui découvert récemment dans le vélo d’une cycliste belge.
Bah… vaut mieux ça que mourir, disciple des piqûres, d’un cancer à quarante balais, à cause des pots belges, des steaks espagnols, des élixirs transalpins. Et puis ça va permettre aux seniors +++ de rivaliser avec les jeunes. Un vieux rêve de vétérans qui oublient que le fleuve ne remonte pas à sa source. Se consoleront-ils de savoir qu’ils restent bons pour cotiser pour l’arthrite des vieux ?
Biodiversité
Bon, revenons à nos moutons. Pardon : à nos coureurs.
Médavy est un long fleuve tranquille certes mais également un réservoir de biodiversité.
La palette est large, entre corps au bois et corps aux abois :
un beau gosse qui fait tressaillir les cœurs féminins,
un qui tient la trachée haute,
une femme aux jambes graciles et qui semble voler,
un sac d’os comme un Ukrainien qui a le bras long mais qui n’a pas envie de humer russe,
un ventru qui va faire un bide et qui panse quoi ?
un échalas qui court à pied mais haut la main,
un qui a un coude mou,
un qui court bas les pattes (ou l’épate),
un qui se plaint du dos (renseignement pris, il s’appelle Alain Bagot),
un qui écoute de la musique en claudiquant (Maggie May ou Maggie Bolle ?),
un qui se plaint du bassin (il joue sur le versant sa version de l’iliaque et l’odyssée), victime du fémur des lamentations,
un qui tortille bien du cul,
un qui a un petit buste et un gros fessier (il ressemble à une bouteille d’Orangina). Etc.
Histoire de fesses
En fin de compte, l’ascension au trot ou au galop, c’est une histoire de fesses, molles ou fermes, à hisser haut, que l’on pèse un demi, deux tiers ou trois quarts de quintal.
Histoire de remporter le grand prix de l’Arche de triomphe.
JMF