« Petit pays, petites idées, petits moyens… ». Voilà ce qui se dit dans certains milieux, en évoquant le monde rural. Carrouges, par exemple.
Eh bien, dans ce bourg loin de tout une dizaine d’acteurs vient de réussir à sauver l’hôtel-restaurant du Nord, une institution fermée depuis un an.
Un établissement qui a pris l’eau. Le matériel a été mis en vente en octobre 2016 : dix habitants du coin ont investi 20 000 € pour racheter 90 % du matériel, « notamment la licence IV » confie Jean Vidu. Une chance : le jour de la vendue, il y avait des véhicules sur une centaine de mètres, prêts à embarquer la marchandise.
On recrute
Restait à trouver un repreneur. Patrick Birée, fils de la propriétaire, a passé une annonce dans un journal professionnel. « Plus de trente personnes se sont renseignées, dont des farfelus, des gens qui n’avaient jamais mis les pieds et les mains dans une cuisine », souligne Annick Puech.
Les candidats sérieux se comptaient sur les doigts d’une seule main. Et le choix s’est arrêté à la fin de l’hiver sur Jean-Michel Rémond.
Un homme qui a roulé sa bosse ici et là. À 52 ans, « je cherchais une opportunité pour m’exprimer pleinement », confie celui qui va proposer « une cuisine traditionnelle française avec le plus possible de produits locaux et de saison : il n’y aura pas de fraises en novembre ».
Cuisine de terroir
Selon lui, « la bonne cuisine, c’est ce qu’on trouve sur un vrai marché ». Il faut donc s’attendre à une cuisine de terroir et la contrée ne manque pas de bons produits, du gibier aux champignons.
Il lui faudra jouer sur deux registres : le menu en semaine, sans doute à 12,50 €, et le menu gourmand « aux alentours de 25-27 € ».
Il compte ouvrir avant le week-end des 17-18 juin.
Le 18 juin, c’est le jour de la fête des Pères et Eugène-Loïc Ermessent, père de ce sauvetage selon Denise Birée, propriétaire des murs, ne cache pas sa satisfaction : « il faut inverser le discours ambiant : Carrouges n’est pas battu d’avance. Le pire ratage, c’est ce qu’on n’a pas essayé ».
Optimisme
Le 18 juin, c’est aussi le jour anniversaire de « l’Appel » d’un général qui voulait résister à la spirale de la défaite. « Nous sommes d’incorrigibles optimistes », ajoute Annick Puech.
Tous ne souhaitent qu’une chose : que Jean-Michel Rémond remporte le challenge qu’il s’est lancé au milieu d’un département qui veut attitrer davantage de touristes. Il compte d’ailleurs proposer cinq chambres d’hôtes et faire gîte d’étape. De quoi satisfaire toutes les bourses.
Patrick Birée respire. Sa famille est propriétaire depuis 75 ans : « vendre l’affaire, ce n’est rien. Mais la fermeture… ». Celui qui se souvient de son premier sapin de Noël n’a pas besoin d’achever sa phrase.
JMF