Allain, avec deux ailes
Cela a commencé dans les années 90. A l’époque, j’en avais assez des capilliculteurs habillés comme des cosmonautes et j’avais décidé d’aller chez un coiffeur qui coupait juste les cheveux et incidemment discutait avec son client.
C’est un peu par hasard que je me suis retrouvé dans le salon de coiffure d’Allain Lebossé dont les miroirs étaient encadrés de médailles, diplômes et coupes (autres qu’au rasoir). Ma curiosité naturelle me fit engager la conversation sur ce que je ne pouvais que voir devant moi : les mots course, marathon et même 100 km (en courant !!!?). Je ne savais pas que je mettais le doigt de pied dans l’engrenage. C’est ainsi que j’ai intégré la bande à Lebossé et littéralement appris à courir à l’instar de bon nombre de sportifs locaux qui croisèrent un jour sa route.
Allain, avec deux ailes, m’accompagna sur mon premier semi-marathon puis, de conseils en incitations, me convainquit que moi aussi je pouvais courir un marathon, discipline que je croyais jusqu’ici réservée aux surhommes. Puis ce fut le tour du trail : 30, 40, 50 et même 80 km, sans parler du mythique 100km de Millau… Cela prit le temps qu’il fallut, Allain n’a jamais bousculé quiconque ; adepte de la méthode douce, il amenait chacun à se dépasser ou plutôt à se révéler à travers le sport.
Plus de vingt ans ont passé et je croise toujours la foulée de ce mystique de la course à pied. Grâce à lui, j’ai déjà bien entamé mon deuxième tour de monde en distance parcourue et partagé notre passion avec d’autres auxquels j’ai à mon tour tenu la main sur les chemins du marathon.
En cette fin janvier, Allain va courir son 42ème marathon à Marrakech en hommage à Serge Vigot, ancien organisateur du marathon d’Argentan et créateur de celui de la Rochelle. Nous serons une bonne vingtaine à l’accompagner pour son dernier marathon.
Dernier marathon, c’est son choix mais sa vie de coureur ne s’arrête pas là. A bientôt soixante-sept ans, il lui reste encore à courir son dixième cent kilomètres de Millau mais aussi à arpenter longuement les pistes du désert marocain, sa seconde patrie qu’il aime tant…
Thierry JACQUET