Lorsqu’on l’écoute parler du monde du cheval, on se demande s’il n’est pas né dans une écurie.
Depuis vingt-six ans, Ronan Losq côtoie le monde équestre.
Son père est palefrenier-soigneur au haras de Buff, à Colombiers : « il m’a transmis le virus ». Et un jour le fils a lancé : « je veux faire le même métier ».
Un souhait qui ne semble pas avoir emballé ses parents : « le métier est un peu ingrat, pas forcément bien payé, pas reconnu ».
Avec Jacques Boudet
Qu’importe : le jeune Ronan a du sang breton. Le voilà embarqué au lycée agricole de Sées mais les études… ça le barbe. Il veut entrer dans la vie active, toujours au grand désespoir de ses parents.
Les stages lui ont mis le pied à l’étrier. Et pas n’importe où : au haras d’Etreham, dans le Calvados. Une première maison prestigieuse, avant d’entrer au haras de Bois-Roussel, près d’Essay, en janvier 2012. Une propriété de la famille Wildenstein. Une maison moins renommée que jadis et naguère, mais historique : « là, Jacques Boudet m’a appris les bases du métier ».
Le métier ? « Comme une maternité avec des mamans et des bébés ».
Et puis Ronan a « envie de voyager et voir autre chose ».
Belle mariée
Première étape dans le pays d’Auge, au haras de la Motteraye, créé par Lucie Lamotte et Gwenael Monneraye, spécialisés dans le consignment : « ils reçoivent des chevaux et les préparent pour les ventes, celles de Deauville notamment ». Objectif : « que la mariée soit la plus belle possible ».
Un futur champion des hippodromes, « c’est un bon pedigree, un cheval prêt à courir, manifestant de la précocité, avec une alimentation et un travail au cas par cas.
Après, il y a l’entraînement. Tout joue : l’environnement, le jockey ou le driver… Il faut également être ferme et pédagogique ».
La chance pour tous
Le poulain a 18 mois lorsqu’il arrive, 20 lorsqu’il est vendu. Cela fait donc deux mois de préparation : « on sait que tous ne seront pas des champions mais tous doivent avoir leur chance. À la Motteraye, les propriétaires ont de nouvelles méthodes. Une révolution ».
Chemin faisant, Ronan Losq rencontre Vanessa Teehan, une Française installée en Irlande.
Solitude
La deuxième étape débute le 22 janvier dernier : Ronan Losq embarque avec sa voiture à Cherbourg. Durant les dix-huit heures de traversée, il aura l’occasion de se dire « Qu’est-ce que je fous là ? ».
Il débarque à Rosslare et commence par conduire à gauche, destination Carrick-on-Suir, dans le vent et la pluie :
« J’étais bien en Irlande ».
Les premiers instants ont des allures de « long moment de solitude ».
Au haras de Vanessa Teehan, un collègue est resté quinze jours avant de s’en aller : « pas le temps de réfléchir… il y avait du boulot ». Dans un haras spécialisé dans la monte où « les juments arrivent par wagons ».
Le temple Coolmore
Cela fait donc un an que Ronan Losq arpente l’Irlande et côtoie de grands noms du monde hippique : notamment les courses de Punchestown et Coolmore, haras de renommée mondiale où est né Galiléo, « père des trois premiers du dernier Prix de l’Arc de Triomphe ».
Le cheval le plus prestigieux qu’il ait côtoyé, avant Aquarelliste et Beauty Parlour.
Les rencontres, c’est aussi des hommes comme Willie Mullins, grand entraîneur de chevaux d’obstacles.
Le circuit des ventes
Ronan Losq vient de s’offrir une pause d’un long mois en France, au pays d’Alençon, avant de reprendre le chemin de l’Irlande, ce jeudi 29 décembre.
Il sera de retour au pays natal l’été prochain : « je ferai les ventes en free-lance ». Les ventes de poulains avec tout un circuit, d’août à décembre : Deauville, Doncaster en Écosse, Baden-Baden en Allemagne, Tattershalls en Angleterre, Goffs en Irlande…
« Un métier dur physiquement, avec des déplacements notamment ».
À 26 ans, Ronan Losq se dit « le plus heureux du monde dans un pays où existe une vraie culture Cheval ». Un monde moins guindé qu’en France où le secteur cultive le « entre nous ». En Irlande, ce secteur est beaucoup plus populaire, et moins cloisonné.
En Australie ?
Mais la balade irlandaise sera une étape parmi d’autres. Ronan Losq compte bien poursuivre sa chevauchée, « aux États-Unis, en Nouvelle-Zélande et surtout en Australie », confie-t-il en appelant un cheval de ses parents. Un cheval baptisé « Breizh Izel » qu’il attire sans problème avec un « Come on ». C’est-à-dire « Viens » en anglais.
Fondu de cheval, le jeune homme s’est fondu dans l’univers anglo-saxon. Au petit trot et même au galop.
JMF