« J’aimerais œuvrer pour la paix, en être le porte-parole ». Voilà ce que Magdi répond, quand on lui demande ce qu’il aimerait faire plus tard. Le jeune homme de 25 ans est « très engagé » pour les siens :
« Je viens de la région Ouest du Soudan. Là-bas, notre indépendance n’est pas respectée par le gouvernement. Mon ethnie est victime de discrimination, de persécution », déplore-t-il, dans un anglais impeccable.
« Calais : une étape marquante »
Le 24 octobre dernier, Magdi est descendu du bus qui le ramenait de Calais, avec une cinquantaine d’autres migrants. Depuis, il est accueilli au CAO – Centre d’accueil et d’orientation – d’Alençon (lire ci-dessous). Le Soudanais a passé cinq mois dans « la jungle ». Une « étape marquante » : « C’était très compliqué, la vie dans le camp. Nous dormions à l’extérieur ». Mais la « jungle » n’est pas qu’un mauvais souvenir : Magdi y a côtoyé un brassage de cultures, de nationalités, de caractères.
Le bilingue était très impliqué : « J’étais bénévole pour l’association France Terre d’asile : je faisais les traductions arabe/anglais ». Magdi donnait aussi un coup de main pour la distribution des repas. La solidarité, née dans le camp improvisé, lui a permis de « croire de nouveau en la protection d’un pays ». Ses multiples missions volontaires l’ont aussi aidé à « retrouver la dignité », « se tenir debout ». Les adieux ont été déchirants.
Mais le départ forcé a été un soulagement : « Les conditions de vie étaient déplorables. Je suis chanceux d’avoir quitté Calais ».
À Alençon, le Soudanais se « sent bien ». Sa priorité ? « Apprendre le français, pour pouvoir tisser des liens ». Et aussi pour narrer son histoire. Dire partout où il va que, chez lui, c’est la guerre, et que sa belle région est meurtrie. « Je représente mon peuple, j’aimerais le protéger, sensibiliser les Français à ce sujet ». Après plusieurs attaques sanglantes visant son ethnie, Magdi a dû fuir, et laisser ceux qui l’aimait. « Ma grand-mère m’a beaucoup parlé de la France. C’est un pays avec lequel ma région d’origine avait des liens très forts. C’est pour ça que je l’ai choisi ».
Raconter son histoire dans un livre
Pour rejoindre l’hexagone, Madgi est passé par la Libye, où il a été fait prisonnier par des unités terroristes. Relâché après trois mois de captivité, il a pu regagner l’Italie, puis la France : pays où l’on respecte ses droits, sa liberté et où il espère « construire » sa vie future.
À Alençon – « petite ville agréable où l’on se sent libre » – le demandeur d’asile partage un appartement avec d’autres Soudanais. Il joue de nouveau les traducteurs pour une association et a entamé la rédaction de deux ouvrages : l’un retrace l’histoire de son peuple, l’autre son parcours personnel. « J’aimerais qu’un jour ils soient publiés », confie celui qui a « bon espoir » d’obtenir le statut de réfugié.
66 migrants à Alençon
Le CAO – Centre d’accueil et d’orientation – a vocation à accueillir provisoirement les migrants. Une « mise à l’abri humanitaire », en attendant que soit étudiée la légitimité de leur demande d’asile. À Alençon, le centre a ouvert en mars 2016 et est géré par l’association Coallia. Aujourd’hui, il accueille 66 migrants, dont une cinquantaine en provenance de Calais. Les logements sont diffus sur toute la ville. En plus de l’hébergement, Coallia propose un accompagnement social et administratif (constitution du dossier de demande d’asile, accès aux soins et gestion de la vie quotidienne).