Né en 1948 dans l’état de New-York, Bill Cain, 2,04 m, débute par l’athlétisme en sprint. « Cela m’a beaucoup aidé pour le souffle. » Ce n’est qu’à partir de 18 ans qu’il s’intéresse au basket. Sorti de la fac d’Iowa en 1970, il poursuit ses études pendant une année supplémentaire pour obtenir un master en psychologie.
En 1971, il décide de tenter sa chance en Europe et signe en Belgique, à Gand, où il ne restera qu’une saison car, repéré par la Jeanne d’Arc de Vichy, il signera pour trois ans. Il n’y avait que deux professionnels dans l’équipe et il termine à la 2e place des meilleurs marqueurs du championnat avec 28 points par match.
Chambré
« Quand nous sommes montés en Nationale 1, avec Vichy, nous allions jouer en voiture à l’époque, notamment en Citroën SM Maserati. Nous partions le vendredi, nous visitions la région, nous ramenions des spécialités… Cette fois-là, nous allions affronter Antibes, une des meilleures équipes du moment, et nous sommes allés dans un restaurant, où nous avions bien sûr des menus à part, et j’ai découvert une daurade que mangeaient des clients… Ça sentait tellement bon, c’était tellement appétissant, que j’ai dit : « Si on gagne ce match, je veux manger une daurade ». Et ce match, nous l’avons gagné, à Antibes, et le lendemain sur les journaux, les commentateurs se demandaient ce qu’avait mangé ce joueur qui courait partout (moi), s’il était dopé ? J’avais gagné ma daurade ! Je me suis bien fait chambrer par mes coéquipiers ! ».
Trois fois champion de France
En 1975, il arrive au Mans. Naturalisé Français après avoir épousé une Française, il devient international en 1978. Il porte le maillot tricolore 63 fois, marquant 754 points. Il devient entraîneur-joueur de l’équipe en octobre 1982. Il quitte le SCM en 1983, après huit saisons au Mans, avec lequel il a gagné trois titres de champion de France en 1978, 1979 et 1982.
« À l’époque, j’avais la clé de la Rotonde, j’habitais tout à côté et on s’entraînait dur, trois heures le matin et trois heures l’après-midi. C’était l’époque de Christian Baltzer. Le problème, c’est que nous n’avions pas de couverture sociale, et ce n’est que lors de mon (désastreux) passage à Mulhouse que nous avons commencé à en avoir… Il fallait prendre des assurances pour nous assurer, nous et notre famille contre les risques de blessure ou de maladie. J’ai perdu 11 années pour ma retraite ! ».
Après l’arrêt de sa carrière de basketteur, il travaille « dans une maison de parapharmacie, à Euro Disney aux débuts. C’était l’époque où les Japonais arrivaient en France. Je devenais interprète, puis je suis allé huit ans à Monaco comme éducateur sportif et assistant d’anglais dans une école. Puis à Sartrouville, j’ai passé des concours pour valider ma formation universitaire et j’ai obtenu mon diplôme d’État BE1. Je m’occupais de jeunes basketteurs, j’avais une équipe de bras cassés à qui il a fallu apprendre beaucoup de choses à commencer par le respect ! Nous avons réussi à gagner deux matches… ».
Des regrets ?
« J’ai pu blesser des gens par mon comportement, par un certain égoïsme. Depuis deux ans que je suis en retraite, je suis apaisé ! J’ai eu le temps de réfléchir sur ma vie passée. Ma grande fierté, c’est mon fils de 26 ans, dentiste à Clermont-Ferrand ».
Pourquoi Montreuil-le-Chétif ?
Comment est-il arrivé ici ? « Ma femme voulait aller à Auxerre… Moi, je ne voulais pas du tout aller là-bas… Le jour où nous aurions dû visiter des maisons, j’ai tout fait pour ne pas y aller, je faisais semblant d’avoir des problèmes avec la voiture… Nous sommes ensuite allés dans le Sud-Ouest, mais les maisons étaient trop chères… »
« Je voulais une maison en pierres. Je suis tombé sur celle-ci qui n’avait que deux pièces, était dans un triste état, et cela fait neuf ans que je la restaure mais c’est une petite maison qui me convient bien. Elle ne plaît pas trop à ma femme, elle n’aime pas trop la mentalité sarthoise, ni le climat, et on m’a regardé avec méfiance au début, mais moi j’aime bien le calme, ça m’a donné la possibilité de réfléchir sur ma vie, d’en faire le bilan… Si je veux du bruit, je vais à New York ! ».
Prend-il encore soin de sa condition physique ? « Je me suis remis au vélo. Cela faisait six ans que je n’étais plus monté sur un vélo, pas facile d’en trouver un adapté à ma taille ! Roger Legeay m’en avait fabriqué un… Après quelques kilomètres, j’étais cuit ! Je suis arrivé à Sougé-le-Ganelon, je suis resté assis un long moment, les gens se demandaient ce que j’avais… Maintenant, quand ils me voient sur la route, ils me font des signes de la main en me disant « il y a des progrès ! ».
Sur un timbre
Des souvenirs, Bill Cain en a plein la tête. Il montre avec fierté, la photocopie d’un timbre de 165 F, édité par la République Fédérale Islamique des Comores, édité à l’occasion des Jeux Olympiques de Los Angeles de 1984, sur lequel il figure en compagnie de Richard Dacoury…
« C’est une grande fierté d’avoir un timbre à mon effigie, même Tony Parker n’a pas cela… ».
Autre séquence émotion, lorsqu’il montre une photo, sur laquelle, tout jeune enfant, il est dans les bras de Mohammed Ali, avec à ses côtés Don King, l’organisateur de combats de boxe… « Cassius Clay, on aime l’homme ou pas, mais c’était un grand Monsieur ! Les Noirs avaient le droit d’aller se faire tuer au Vietnam, mais n’avaient pas le droit d’entrer dans un restaurant pour blancs… ».
La mort ? « J’ai envie de mourir en bonne santé ».